Un conseil national de la médiation et de la conciliation, un écueil pour une bonne idée ?

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Christiane Taubira (Wikipedia)

Une justice appauvrie et les risques d’une médiation décalée

Le 9 septembre 2014, Mme Taubira a annoncé la création d’un conseil national de la médiation et de la conciliation (site du ministère de la justice et interview sur le Parisien). Dans cette démarche, elle annonce en réalité des restrictions budgétaires qui appauvrissent l’appareil judiciaire et desservent les justiciables. Pour la Chambre Professionnelle de la médiation et de la négociation, ce conseil national de la médiation et de la conciliation est un écueil pour une idée dont pourtant la CPMN est porteuse depuis plusieurs années.


Depuis notre proposition de 2011, nous pourrions être satisfaits de cette annonce. En effet, cette structure ambitieuse ne saurait laisser indifférents les représentants de la profession de médiateurs. L’idée est issue de nos propositions pour la promotion de la médiation en l’occurrence, plus précisément il s’agissait d’une commission nationale de la médiation que nous voulions plus large. L’instance proposée est restrictive, même si la conciliation y a été raccrochée.

L’inquiétude des professionnels de la médiation

Plusieurs points sont susceptibles d’inquiéter les professionnels et à fortiori les usagers. La proposition de 2011 se voit limitée au champ stricto sensu du système judiciaire en entretenant la regrettable confusion que la médiation serait l’apanage d’une conception juridique de la gestion des conflits, tandis qu’elle est une instrumentation de la libre décision et de la résolution des différends. La médiation doit offrir une authentique alternative aux modes traditionnels qui entretiennent les différends dans les arcanes du droit.

La médiation instrumente la libre décision

Il est regrettable que cette idée soit dévoyée. Elle est de plus  combinée avec la conciliation qui est une pratique qui n’a rien à voir avec une médiation dont l’objectif est de permettre aux personnes de retrouver les positions initiales de liberté qu’elles avaient lors de leur entente antérieure qui s’est dégradée. La conciliation reste liée au système d’autorité duquel la médiation permet de s’affranchir.

La conciliation fait partie d’une instrumentation liée à l’arbitrage et si, aujourd’hui, un échec patent peut être constaté concernant cette pratique, il apparait peu judicieux de tenter de la réhabiliter en l’associant à la médiation.

La médiation pour mieux décider non pour masquer des économies structurelles

Dans le même ordre d’idée, la médiation dont il s’agit ici avec ce projet de conseil national, est une forme de médiation qui risque de servir illusoirement le projet de faire des économies structurelles, sans pour autant garantir aux citoyens la libre décision qui peut leur être promise. Il serait dommageable que les justiciables soient entrainés dans cette démarche où la qualité du résultat n’est qu’un discours tandis que priment une démarche idéologico-religieuse qui ne cache pas ses relations avec « la manifestation pour tous » et les préoccupations de restriction budgétaire. La qualité du lien social est celui du pacte entre les personnes dans notre société, il ne peut pas être l’otage de préoccupations idéologiques obsolètes et budgétaires.

Quelle est donc cette médiation qui a opportunément l’oreille de Mme Taubira ? Nous avons déjà eu l’occasion de qualifier cette forme de médiation de médiation pour obéir; c’est à dire en fait un nouvel habillage des procédés de décision imposée par un tiers (Juge, arbitre) ou fortement suggérée (conciliateur). L’échec de la médiation familiale ne se corrige pas. La démarche entreprise est un entêtement dans l’erreur déjà faite avec les mêmes acteurs vers les mêmes écueils. La médiation généraliste doit-elle être entraînée dans ce naufrage et cette faillite ? La contre-productivité semble être aux commandes.

En plaçant la médiation sous la tutelle du ministère de la justice on pourrait croire que le droit ouvre la porte à la médiation mais en réalité, le droit à la médiation n’est pas respecté.

Nous proposons de travailler ce projet pour aménager les solutions mieux adaptées.

Les médiateurs professionnels (CPMN) interviennent dans les TGI avec un indéniable succès.

Notre démarche depuis 2001 a tracé l’orientation pour la professionnalisation de la médiation. Nous avons élaboré le premier code d’éthique et déontologie de la médiation – CODEOME. Ce code a été repris par des organisations Outre-Atlantique et sous des formes édulcorées par des organisations lobbyistes auprès du ministère de la justice.

Enfin, cette feuille de route s’est appuyée sur un travail unique dirigée par M° Agnès Tavel pour assembler et préparer la codification des textes législatifs et règlementaires concernant la médiation sous le titre de Code de la Médiation et du Médiateur Professionnel dont la 2ème édition a été préfacée par le 1er Président de la Cour d’Appel de Fort-de-France, M. Bruno Steinmann.

La CPMN offre de participer à améliorer le lien social et la pratique de la résolution des différends

En tant qu’organisation syndicale, promoteur du droit à la médiation et de la laïcité, nous avons l’expérience  de la médiation judiciaire avec des résultats constants et bien plus satisfaisants que toute autre association aujourd’hui qui prône cette approche de la médiation que nous désavouons. C’est la raison pour laquelle nous proposons nos compétences pour pouvoir faire avancer ce projet dont nous sommes les initiateurs.

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Jean-Louis Lascoux
"Je prends de l’avance sur les générations futures." Chercheur en Ingénierie relationnelle et médiation professionnelle - CREISIR. Directeur de publication de L'Officiel de la Médiation, initiateur de la Médiation Professionnelle et du droit à la médiation, auteur de "Pratique de la médiation professionnelle" (ESF Sciences Humaines), du Dictionnaire de la Médiation (ESF sciences Humaines), de "Et tu deviendras médiateur et peut-être philosophe" (Médiateurs Ed.), Président de l'EPMN. "... La vie ne m’a pas déçu ! Je la trouve au contraire d’année en année plus riche, plus désirable et plus mystérieuse..." Friedrich Nietzsche, Le gai savoir, aphorisme 324, 1882

6 Commentaires

  1. Bonjour. Oui ! Et cela, sur une proposition qui émane de la médiation professionnelle elle-même, cette proposition se trouvant ainsi détournée de son propos, pour ne pas dire dévoyée. L’une des questions, dès lors, est de savoir si nous devons exiger d’être partie prenante de ce « Conseil » pour y faire valoir nos conceptions, ou bien nous en écarter, au risque d’être les seuls… Peut-être pouvons-nous en parler en Conseil d’Administration ? Ou bien lors du Symposium ? Cordialement,

  2. Bonjour, les différencse entre la médiation professionnelle et les autres types de médiation, se trouvent dans la conception de la posture du tiers et la conception de la pratique. Pour les MP, la posture du tiers est résolument indépendante de toute autorité, a fortiori de l’Etat, et les MP offrent à leur client les garanties indissociables de l’exercice du droit à la médiation. Ce que veut faire la ministre de la justice c’est compromettre le système de médiation, tentant d’embarquer avec la médiation professionnelle, dans un système où le sens même de médiation sera confondu avec la conciliation. Autrement dit, c’est non seulement une conduite à l’échec assurée, mais une atteinte à une liberté fondamentale : la liberté de décision, laquelle échappe jusqu’à maintenant à toute mise sous tutelle.

    En effet, en plaçant la médiation sous la tutelle du ministère de la justice, c’est une mise sous tutelle de la liberté de décision.

  3. Bonjour. Les médiateurs professionnels sont régulièrement taxés par leurs détracteurs (tout particulièrement les « gens de justice », juges et avocats au premier rang), de vouloir substituer à une justice claire et efficace un processus vague, « subjectif », voire fantaisiste et surtout incapable de garantir aux protagonistes d’un conflit le respect de l’intégralité de leurs droits. La médiation professionnelle oppose à cela le droit du « contrat » : c’est l’accord élaboré sur la base du consentement des interlocuteurs eux-mêmes qui fait leur loi. Pour que soit préservée la liberté individuelle, cet accord doit être l’élément structurant régissant les relations entre les personnes. Ce rappel de principe ouvre bien des débats, ils pourront être épuisés en leur temps et en des lieux mieux adaptés. Quoi qu’il en soit, à partir de cette affirmation, la médiation professionnelle milite à se distinguer de la justice, plus ou moins radicalement selon les intervenants. Le médiateur professionnel n’est pas un juriste. Le médiateur professionnel agit indépendamment de tout traitement en droit et son intervention consiste en l’aide à la recherche de solutions qui pourront, le cas échéant, trouver à s’articuler avec l’institution judiciaire, en fonction de la volonté des parties, mais en-dehors de l’office du médiateur. En ce sens, d’ailleurs, la médiation professionnelle est fondamentalement respectueuse de la justice. Elle en est même un défenseur fervent, considérant que le principe d’égalité est le terreau le plus indispensable à son propre épanouissement.
    Or, il semble qu’il l y ait problème. La justice serait trop lente et retarderait dès lors l’échéance d’une légitime réparation, elle serait surchargée et produirait trop souvent des arrêts bâclés voire erronés, elle deviendrait financièrement inaccessible, contredisant ainsi les fondements mêmes de l’état de droit… Mais si problème il y a, n’est-ce pas un problème politique global ? Un problème de conception de la société? Une question de moyens donnés à l’institution ? Pourtant, plutôt que de répondre de façon rationnelle à ces interrogations, l’état français, en la personne, ici, de Madame Taubira, avance une démarche d’assimilation qui s’engouffre dans le travers que l’on nous reproche alors même que, pour notre part, nous nous en défendons. Ce n’est pas le moindre des paradoxes ! Proposer de joindre dans un même corps (un « Conseil de la médiation et de la conciliation »), la démarche du médiateur et celle du juge, en les supposant intervenir sur un même plan, c’est bien créer toutes les conditions d’une pseudo concurrence, inexistante dans la réalité. Cela ne peut qu’embrouiller un projet initialement très simple. Qui plus est, la perspective s’avérera à coup sûr préjudiciable pour tous : justiciables ou citoyens, institution judiciaire, médiation, mais aussi, par voie de conséquence, société tout entière !
    Qu’on s’en souvienne ! La médiation professionnelle s’est toujours située dans le champ du consentement, considérant du même coup qu’elle doit se refuser à agir dans celui de la décision impérative éventuellement appuyée par la force publique-domaine du système judiciaire. C’est à notre corps défendant que l’on procéderait à un amalgame entre ces deux niveaux d’intervention dans un conflit : l’aide à l’élaboration, par les parties elles-mêmes, d’une solution acceptée par chacune et la contrainte imposée au coupable au nom de la défense de la victime.
    C’est aussi, sans doute, au nom de ce message qu’il importe que la médiation professionnelle soit partie prenante d’un tel « Conseil », ce qu’elle revendique haut et fort. Cordialement,

  4. Comment parlé de médiation quand une ex épouse refuse toute conciliation familiale proposé de son ex époux ?
    Comment parlé de médiation quand l’ex épouse le refusera à son seul profit vu que les juges ne peuvent l’en empêché de la refusé la médiation !
    Comment parlé de médiation quand une mère manipule en parfait syndrome d’aliénation parentale perverse , deux enfants sur 4 années dressés uniquement à haïr leur père et famille globale paternelle incluant également des enfants vivants chez leur pères de moins de 15 ans au nombre de 5 rejeté par l’ex épouse violente à tout point de vu contre le père ciblé ?
    Comment obtenir justice et simple charge d’enfants quand une ex femme déboule devant le JAF et le JPE raconté que le père serait ceci ou cela sans devoir en apporté moindre preuve justifié et primé de son invention accusatoire néfaste bien évidement contre son ex époux ?
    Comment enfin vu que la justice familiale comporte plus de femmes juges que d’hommes juges, comment peu ont se justifié d’être père et victime de son ex épouse quand le sexisme du choix personnel partial favorisant uniquement les ex épouses de juges est la grande mode jaf ou jpe ?
    comment peu ont m’expliqué que 2 enfants soit privés de toute leur famille paternelle depuis 4 ans totalement ceci due a l’obstacle totale en tout point de vu de mon ex femme et de son conjoint dans l’obstacle a tout rapprochement père et fils ?
    médiation avec une telle ex épouse qui devrais juste se voir pénalisé de c’est mauvais agissement, n’oublions pas que la manipulation d’enfants contre un parent CIBLE est un traumatisme psychologique provoqué du parent agressif et pourquoi quand c’est une mère qui fais ce genre de délit elle obtiendra charge des enfants et pour le père un droit de visite médiatisée en lieu neutre (centre fermé une fois par mois et quelque heures qui peu nous expliqué ceci ?
    au nom de qui ou de quoi la justice de Montargis JAF ET JPE prive a absolument toute la famille paternelle depuis 4 ans de privation de vu de deux enfants totalement ?

    de Stéphane Joly téléphone père de Kristy et mike Joly (jamais revu en 4 ans du a l’obstacle de mon rôle parentale par leur mère et favorisé des juges JAF de Montargis au motif = inexistant par les attestations ou preuves accusatoire de l’ex épouse !

    • Monsieur vous mettez là en avant une des raisons pour lesquelles le droit à la médiation est nécessaire pour défendre le droit de chacun à accéder à un mode amiable de résolution des conflits. Ce qui dans votre cas paraît une nécessité perceptible dans vos propos. Cordialement.

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