Comment dépasser la guerre et penser à une civilisation Monde fondée sur l’Entente ?

Gaston Bouthoul a marqué l’histoire des sciences sociales en fondant la polémologie, cette discipline rigoureuse qui prétend étudier les guerres comme des faits sociaux objectivables, dépassant le mythe héroïque ou la fatalité tragique. En cela, il a initié une démarche précieuse : mettre la guerre à distance, l’observer, la quantifier, en identifier les structures et les récurrences. Il a contribué à faire de la guerre un symptôme lisible plutôt qu’un destin aveugle.

Mais cette entreprise, si elle s’attache aux régularités historiques et aux dynamiques collectives, laisse dans l’ombre un ressort décisif : l’origine localisée de la décision guerrière. Les conflits n’émergent pas spontanément des peuples, mais des pouvoirs. Ils naissent de fidélités idéologiques, de jeux d’influence, d’intérêts privés, d’inimitiés personnelles — autant de ressorts affectifs, stratégiques ou symboliques, qui agissent dans l’ombre de la parole publique. Loin d’être organique ou inexorable, la guerre est provoquée, tolérée, instrumentalisée par des instances de commandement souvent déconnectées de la réalité vécue.

À cette manipulation tactique s’ajoute une manipulation symbolique, plus pernicieuse encore : la logique sacrificielle. Ceux qu’on enrôle dans les armées — jeunes, malléables, formatés — sont projetés dans un récit où leur vie se voit sublimée par l’idée de sacrifice. Mourir pour une cause, une patrie ou une autorité devient un accomplissement valorisé, une preuve d’honneur. Cette illusion — héroïque en apparence, tragique en essence — légitime le renoncement à soi au profit d’un ordre extérieur. C’est un héroïsme imposé, à la fois criminel et suicidaire, qui nourrit les chroniques nationales autant qu’il détruit des existences singulières.

C’est précisément à ce niveau que la Théorie de l’AJustativité Générale (#TAG) – que j’ai fondée en lien avec la médiation professionnelle et l’ingénierie systémique relationnelle – introduit une rupture radicale. Elle récuse toute forme de légitimité accordée à un pouvoir de décision exercé sur autrui, dès lors qu’il s’appuie sur des schémas de domination, de délégation ou de soumission collective. Elle montre que les conflits armés ne relèvent pas d’une fatalité historique, mais de la perpétuation d’une servitude volontaire systémique, où l’on renonce à sa capacité d’ajustement en échange d’un récit de protection, d’appartenance ou de grandeur.

La #TAG ne cherche pas à pacifier la guerre. Elle en déconstruit la nécessité. Elle propose un modèle fondé sur l’ajustement libre, raisonné et autonome des relations humaines, où ni l’opposition ni le ralliement ne sont des conditions d’existence. Dans cette optique, les relations ne sont plus gouvernées par des rapports de force mais par des logiques de coexistance ajustative — souples, conscientes, évolutives.

Elle s’oppose aussi à toutes les formes de communautarisme autoritaire, qui, au nom de valeurs ou d’identités de groupe, justifient l’exclusion, la revendication exclusive ou la lutte pour la prééminence. Dans un monde interconnecté, nul groupe ne peut légitimement se soustraire au destin partagé de l’humanité.

Ne sommes-nous pas à une heure avancée de l’élaboration d’une civilisation Monde ?
À l’heure où les outils techniques et cognitifs permettent la mise en relation immédiate de chacun avec tous, il devient absurde de tolérer encore des systèmes qui attribuent à quelques-uns le pouvoir d’entraîner des millions.

La guerre n’est plus une fatalité, elle est un anachronisme.
La #TAG propose une voie post-guerrière : une architecture de relations fondée sur l’ajustement éclairé, la désactivation des chaînes de commandement idéologique, et la reconnaissance mutuelle dans la pluralité. Non pas une morale, mais une nécessité structurelle, vitale, pour la cohérence et la pérennité d’une civilisation Monde en devenir.

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